La revue Recherche en didactique a organisé le 3 février un séminaire sur « Publier en didactique » organisée autour de 4 tables rondes :
- La gestion des expertises avec Richard Etienne (Directeur de la publication de la revue Éducation et socialisation) en réactants et Chantal Amade-Escot (membre du comité éditorial de la revue Education et Didactique) et Elisabeth Menouar et Dalila Moussi (revue Recherches en Didactiques)
- Le travail d’expertise avec Joachim Dolz (Université de Genève, didactique du français) en réactant et Véronique Lemoine (Atilf, Nancy, membre du comité éditorial de ReD) et Sylvain Doussot (Cren, Nantes).
- Anticiper l’expertise Sandrine Aeby-Daghé (université de Genève) en réactant et Maryline Coquidé (Institut Français de l’Education, Ecole Normale Supérieure de Lyon) et Caroline Leininger (LDAR, Paris)
- Lectures des expertises par les auteurs avec Xavier Sido (Théodile-CIREL – Lille, membre du comité éditorial de ReD) en réactant et Bernadette Kervyn (LAB-E3D, Bordeaux) et Zoé Mesnil (LDAR, Paris)
Les échanges seront publiés dans le numéro de décembre 2022 de Recherche en Didactique.
Ces quatre tables rondes ont soulevé des questions qui sont rarement ouvertement débattues en didactique. La journée a mis en lumière la fabrique de l’expertise et le rôle de chacun dans la chaine de publication d’un article.
Le rôle de l’expert
Le terme d’expert a été mis en discussion. Les chercheurs qui évaluent les articles sont-ils des experts, spécialiste d’un domaine sur lequel ils émettent un avis ? Ou bien sont-ils des évaluateurs qui participent d’un champ en portant un regard sur le travail d’un pair ? Derrière ces questions émerge la responsabilité vis-à-vis d’un champ scientifique dont l’expert est le garant et la responsabilité vis-à-vis de la communauté scientifique à laquelle l’expert appartient.
Au-delà des termes, c’est le rôle de l’évaluateur dans le processus d’écriture qui a été discuté. Figure à la fois emblématique du processus de publication, l’expert est à la fois un juge qui sanctionne et guide qui accompagne. L’ensemble des orateurs s’est accordé sur la nécessaire bienveillance des évaluateurs dans leur retour aux auteurs pour améliorer la qualité des écrits scientifiques et celle des revues. L’accompagnement des jeunes docteurs à l’écriture a été souligné à plusieurs reprises au cour de la journée. Cela ne relève pas seulement de la responsabilité du directeur de thèse. C’est un élément qui devrait prendre pleinement place dans la formation doctorale. Les revues ont pleinement un rôle à jouer dans cette formation.
Le rôle du comité éditorial
La revue constitue un médiateur dans la chaine éditoriale entre les évaluateurs et les auteurs. Cette médiation est plus ou moins forte en fonction des choix managériaux et scientifiques. La première table ronde a mis en évidence deux manières de faire : soit opérer une synthèse bienveillante des évaluations, soit envoyer les évaluations brutes. La première solution présente l’avantage de s’assurer de la bienveillance des commentaires envoyés. La seconde permet d’ouvrir peut-être plus franchement une discussion, voire une controverse scientifique.
La controverse scientifique est un des termes fort de cette journée. Cela nécessite des réserves car la discussion entre un auteur et des évaluateurs est une discussion indirecte, médiée par le biais de textes interposés, décalée dans le temps, t surtout orientée vers une fin, la publication et dissymétrique entre des auteurs et des évaluateurs. Le dernier maillon de la chaine éditorial est l’auteur.
Le rôle des auteurs
La publication d’un article ne relève pas seulement d’enjeux de scientificité mais aussi de socialisation. Les revues ont une ligne éditoriale explicite qu’il est indispensable de connaitre avant de soumettre un article. Elles ont aussi une ligne éditoriale implicite que les auteurs ne peuvent cerner que par l’expérience et la co-formation entre pairs. La réception d’expertises peut être un moment douloureux.