Carnet Rouge, n°20, décembre 2020
Auteurs : Marc Bablet, Elisabeth Bautier, Evelyne Bechtold Rognon, Choukri Ben Ayed, Michel Blay, Philippe Bongrand, Serge Bontoux, Laurence De Cock, Paul Devin, Guy Dreux, Héloïse Dürler, Nico Hirtt, Christian Maroy, Adrien Martinez, Julien Netter, Régis Ouvrier-Bonnaz, Denis Paget, Christine Passerieux, Bernard Rey, Jean-Yves Rochex, Patrick Rayou, Nathalie Sayac, Rachel Schneider, Elise Tenret, Francis Vergne
Compte-rendu de Caroline Leininger-Frézal
Ce numéro de Carnet Rouge est dédié aux termes employés dans les politiques éducatives et leurs implicites. La force de cette publication est qu’elle rassemble des praticiens (enseignants, chef d’établissement, IP..) et des chercheurs dans un langage accessible à tous. Les textes mettent en évidence les implicites de réformes récentes dans l’éducation nationale. C’est une lecture utile aussi bien aux personnels débutants qu’aux plus confirmés (enseignants, BIATS, personnels de direction) qui voient s’accumuler des changements fragmentés sans toujours en avoir une vision globale (the big picture).
Ces articles mettent en évidence un processus de normalisation de l’école, qui passe d’abord par la standardisation du métier d’enseignant avec la définition de bonnes pratiques et la limitation de la liberté pédagogique. Cela se traduit aussi par le formatage de la formation initiale et continue des enseignants, réduisant ainsi la liberté pédagogique des formateurs. La vision tacite de l’élève qui préside, est tout aussi normée. L’élève est perçu comme autonome, capable de s’engager dans la continuité pédagogique et de satisfaire aux évaluations standardisées.
Ces normes contribuent selon les auteurs, à aggraver les inégalités scolaires. Le recentrage sur les fondamentaux notamment en français et en mathématiques privent les élèves des milieux populaires de la culture à laquelle ils ont peu accès par la famille. Leur autonomie dans les apprentissages et la rhétorique du mérite enferment avec violence, les élèves en échec scolaire dans une impasse que l’orientation vient légitimer et naturaliser.
Ce numéro de Carnet Rouge met également en évidence la performativité du discours de l’éducation nationale sur la confiance. La co-éducation apparait comme un levier d’adhésion des parents à l’institution scolaire plus qu’un partage de la responsabilité éducative et un moyen de mobiliser les collectivités territoriales qui doivent s’impliquer dans des réformes successives venues d’en haut. L’épanouissement des élèves, l’excellence et l’innovation apparaissent au travers des textes, être les mirages des politiques éducatives à l’éducation nationale comme dans l’enseignement supérieur.
L’école de la confiance est celle de la défiance, dans laquelle il y a les Sachants (le conseil scientifique, les neuroscsiences) prescrivent et conseillent. Aux agents d’appliquer et de se taire.