Séminaire La fabrique de la géographie scolaire - 23 octobre 2013
L’enseignement de la géographie au Québec : peut-on parler d’une « société distincte »?
1-
Les programmes de
géographie au Québec
Depuis
2001, année de mise en place des nouveaux curriculums au Québec, l’histoire et
la géographie font partie du domaine de l’Univers
social (US), ce domaine étant l’un des cinq qui compose le Programme de formation de l’école québécoise
(PFEQ). Avec l’arrivée de la réforme, en plus de la mise en place d’une
approche par compétences, le programme de géographie est devenu plus social. Certains
aspects de la géographie physique ayant migré vers le domaine des sciences, la
géographie enseignée est maintenant essentiellement culturelle et humaine et a
notamment pour finalité d’amener l’élève à comprendre les enjeux liés aux
territoires.
Dans
le parcours de l’élève, la géographie est d’abord enseignée au 1er cycle
primaire (élèves de 6-8 ans) par l’entremise d’une compétence visant le
développement des concepts de temps, d’espace et de société. Par la suite, aux
2e et 3e cycles (élèves de 9 à 12 ans) le programme de Géographie, histoire et éducation à la
citoyenneté (GHEC)[1]
vise le développement de trois compétences dans lesquelles le concept de
territoire est central. Malgré la place du « territoire » dans la
formulation de chaque compétence et la présence de techniques géographiques
dans le programme de GHEC, on constate dans les pratiques en classe que la
géographie est « noyée » dans l’enseignement de l’histoire. Devant
cette situation, le Ministère de l’éducation des loisirs et des sports (MELS) a
mis sur pied un petit groupe de travail pour réfléchir à des pistes de
revitalisation de la géographie au primaire. À l’heure actuelle, nous sommes
dans l’attente de leurs conclusions.
Alors
qu’au primaire la géographie est intégrée dans un programme avec l’histoire, au
1er cycle du secondaire (soit pour les élèves de secondaire 1 et 2
(12-14 ans)), elle fait l’objet d’un enseignement distinct et obligatoire (mais
non certificatif). Encore une fois le programme[2]
vise le développement de trois compétences, en plus de cibler cinq territoires
types et 11 concepts principaux (voir tableau synthèse du contenu de formation,
page suivante). Ce programme de géographie, qui s’étend sur deux années (sans
que l’on précise ce qui doit être fait lors de la première et de la deuxième
année du cycle), permet aux élèves d’aborder le Québec, le Canada et le monde,
de cibler certaines techniques (comme le croquis géographique) et surtout
d’étudier les enjeux et les acteurs.
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Source : PFEQ, domaine de l’univers social, programme de
géographie, p. 316
En 3e et 4e secondaire les élèves ne font pas de géographie, ils terminent toutefois leur cursus en 5e secondaire avec le cours obligatoire de Monde contemporain qui est un amalgame d’histoire, de géographie, de politique et d’économie[3]. Finalement, parallèlement à ce cours, il existe, depuis l’automne 2013, un cours optionnel de Géographie culturelle. Ce cours cible six grandes aires culturelles (arabe, occidentale, africaine, orientale, indienne et latino-américaine) et vise le développement de deux compétences, soit la lecture de l’organisation de l’aire culturelle et l’interprétation de son dynamisme. Actuellement l’offre et la demande pour ce cours semblent assez limitées, mais il faudra voir sur la durée!
En 3e et 4e secondaire les élèves ne font pas de géographie, ils terminent toutefois leur cursus en 5e secondaire avec le cours obligatoire de Monde contemporain qui est un amalgame d’histoire, de géographie, de politique et d’économie[3]. Finalement, parallèlement à ce cours, il existe, depuis l’automne 2013, un cours optionnel de Géographie culturelle. Ce cours cible six grandes aires culturelles (arabe, occidentale, africaine, orientale, indienne et latino-américaine) et vise le développement de deux compétences, soit la lecture de l’organisation de l’aire culturelle et l’interprétation de son dynamisme. Actuellement l’offre et la demande pour ce cours semblent assez limitées, mais il faudra voir sur la durée!
2- La formation des
enseignants
Comme
dans différents contextes nationaux, lorsque vient le moment de faire le
portrait de la formation des enseignants, il faut distinguer la formation des
enseignants du primaire de celle de ceux du secondaire.
Au
primaire les enseignants sont avant tout des généralistes, ainsi, selon
l’université fréquentée, ils auront reçu entre 3 et 6 crédits (sur une
formation de 1er cycle universitaire qui en compte 120) de formation
en didactique des sciences humaines (histoire et géographie). En plus d’une
formation disciplinaire limitée, les formateurs sont davantage pédagogues et
historiens que géographes. Résultat : la formation est souvent plus axée
sur l’histoire et du même souffle les futurs enseignants conservent une vision
assez limitée, voire caricaturale, de ce qu’est et peut-être l’enseignement de
la géographie au primaire.
Au
secondaire, alors qu’avant les années 1990 pour devenir enseignant de géographie
il fallait minimalement 60 crédits universitaires en géographie, depuis les
années 2000, et l’arrivée de la formation bi-disciplinaire, ce sont entre 15 et
30 crédits de géographie qui sont maintenant nécessaires. D’enseignant de
géographie, les enseignants sont devenus enseignant d’US et la part de la
géographie dans la formation initiale reflète la place que la discipline prend
dans le parcours des élèves en US. En effet, comme il y a quatre années
d’histoire et deux années de géographie c’est sans surprise que l’on retrouve
deux fois plus de crédits disciplinaires en histoire qu’en géographie dans la
formation des futurs enseignants.
Face
à une formation initiale qui insiste somme toute peu sur la géographie, on
pourrait penser que la formation continue en didactique de la géographie est
bien développée. Or c’est loin d’être le cas! La formation continue de niveau
universitaire est quasi absente, les conseillers pédagogiques dans les
commissions scolaires qui soutiennent les enseignants en exercice sont présents
pour offrir du support mais celui-ci est souvent limité en ce qui concerne la
géographie. Il y a un congrès organisé annuellement pour les enseignants d’US
mais encore une fois les ateliers offerts ciblent peu la géographie (à titre
d’exemple, lors du congrès de 2013 sur une cinquantaine d’ateliers seulement
deux ciblaient spécifiquement l’enseignement de la géographie). En marge de ces
voies, il y a toutefois un réseau de soutien qui se développe, lequel prend
notamment appuie sur le Groupe des Responsables en Univers Social (GRUS) et sur
le site du RÉCIT de l’US (www.recitus.qc.ca),
ce dernier proposant notamment des pistes d’activités pédagogiques.
Tout
d’abord au primaire l’US est enseigné une heure par semaine, le plus souvent en
prenant appui sur un manuel ou un cahier. Ainsi les pratiques mises en place
par les enseignants sont très majoritairement magistrales et en ce qui concerne
la géographie souvent limitées à de la localisation et de la description. Ainsi
malgré la présence des trois compétences qui appellent un enseignement mettant
l’accent sur l’interrelation territoire et société, les éléments liés au climat,
à la végétation ou à l’utilisation d’une carte ou d’un atlas sont étudiés
séparément et sans insister sur leur apport à une compréhension de « l’univers
social ».
Au
secondaire, alors que le programme appelle la mise en place de situations
d’apprentissage complexes dans lesquelles on insiste sur le développement de
compétences et le développement conceptuel, on remarque que la démarche se morcèle
pour s’apparenter davantage à des exercices papier-crayon visant à compléter un
cahier en perdant parfois de vue la globalité du projet. Actuellement il y a
donc une assez forte prépondérance de l’approche magistrale mais ça et là on
retrouve un enseignement axé sur la situation-problème qui persiste.
Ainsi
alors que les programmes de géographie, au primaire et au secondaire, sont
clairement marqués d’une ambition socio-constructiviste, les pratiques en
classe sont souvent teintées de béhaviorisme, lequel caractérisait les anciens
programmes (d’avant 2001).
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