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DE LA RECHERCHE A LA FORMATION

Nous avons créé ce blog dans l'intention de faire connaître les travaux de recherche en didactique de la géographie. Notre objectif est également de participer au renouveau de cette discipline, du point de vue de ses méthodes, de ses contenus et de ses outils. Plus globalement nous espérons que ce site permettra d'alimenter les débats et les réflexions sur l'enseignement de l'histoire-géographie, de l'école à l'université. (voir notre manifeste)

lundi 24 juin 2024

Quand le récit permet de penser l’espace – La carte comme objet complexe pour rendre compte d’une mise en ordre du monde

Séminaire doctoral « Disciplines, disciplinaire, (dé)disciplinarisation », session « Par-delà les disciplines ? Penser les interactions entre dispositifs et curriculum », laboratoire CIREL-Theodile, Lille, 19 juin 2024

Maître de conférences HDR en didactique de la géographie, Sylvie Considère introduit son propos en définissant la discipline comme un processus de découpage des savoirs mais également comme un mode de socialisation.

La géographie se nourrit d’une géographie scientifique (avec ses concepts, des démarches et une complexité) et d’une géographie scolaire (fortement axée sur les études de cas, la démarche inductive mais qui subit une forte simplification). Or le monde est complexe et il n’est pas disciplinaire.

C’est via le projet Géodusocle qui compte des chercheurs de diverses académies et qui ambitionne de voir comment se forgent les acquis scolaires en géographie que Sylvie Considère se propose de saisir des traces de récit dans les cartes, travaux qu'elle a mené avec Jean-François Thémines, professeur à l'Université de Caen.

L’ancrage théorique mobilise les concepts de discipline scolaire (un objet complexe et fragmenté), de sujet didactique (qui produit des contenus en contexte, qui occupe différentes positions comme « élève en classe » ou « acteur socialisé dans d’autres sphères d’apprentissages), de contenus (« disciplinaires » mais aussi « passagers clandestins » non explicitement enseignés), de géographie scolaire (qui est poreuse à des manières de penser l’espace).

Tout cela renvoie à des représentations (géographicité), aux imaginaires, à la secondarisation, au contexte, aux malentendus cognitifs (favorisés par des consignes peu claires parfois), au raisonnement.

Quels attendus ? En cycle 2 : se repérer dans l’espace et en comprendre l’organisation. En cycle 3 : caractériser, penser l’espace. En cycle 4 : raisonner géographiquement.

L’échantillon compte des élèves de CM mais également de collège et ce, de divers types de territoires.

L’idée est de saisir des données comparables, de voir si des savoirs géographiques indépendants des leçons peuvent émerger, si on peut réellement amener les élèves à faire de la géographie.

Le protocole demande d’aménager une île (fond de carte) pour qu’on puisse y vivre et comprendre ce que l’élève a voulu représenter.

Ce sont 1022 cartes mixant différents types de vue qui ont été analysées.

Comment dès lors y repérer du récit ?

Pour qu’il y ait récit, il faut une narration, une représentation d’un évènement, une création ou réinvention du monde, une fiction qui crée des mondes possibles, une définition d’une quête ou une transformation d’un état à un autre. La carte construit un discours, elle raconte l’histoire collective des sociétés, elle est un territoire de référence au sujet à partir duquel le discours est construit. Le récit cadre la vie quotidienne, le récit n’est pas dans les programmes de géographie (mais en histoire, il l’est), le récit est un passager clandestin de la géographie à l’école.

Une hypothèse est que certains élèves mettent à distance le contexte disciplinaire de la tâche et s’appuient sur des contextes de pratiques. D’autres effacent cette histoire et font une lecture de la tâche.

On ne s’attend pas à ce que la dimension narrative de la carte soit primordiale.

Le récit contient de l’action (du mouvement, des transports en circulation, des personnages ou animaux en activité).

Un sous corpus (environ 600 cartes) a émergé pour tenter d’y voir des traces résiduelles de récit, des traces affirmées du récit, une carte-récit.

Quatre propriétés peuvent être définies :

  • une dimension personnelle d’appropriation du contexte de production,
  • une dimension scolaire d’appropriation du contexte de production,
  • une cohérence,
  • un usage des langages graphiques.

L’appui peut se faire sur des références personnelles ou des éléments de géographie scolaire.

La cohérence peut se révéler faible (des juxtapositions) ou forte (la synthèse est atteinte, il y a une mise en intrigue).

Le volet graphique montrera des fonctions d’illustration, d’ancrage, de structuration.

Le récit se retrouve dans les cartes à hauteur de 45 %. Il est fort présent chez les plus jeunes élèves.

Les cartes apparaissent des objets complexes, des imbrications de savoirs scolaires et de savoirs extérieurs mais la géographie scolaire n’en tient pas compte. Ces cartes rendent compte d’une certaine interprétation de la consigne. Elles témoignent d’un discours construit dans un langage composite.

Les cadres théoriques multidisciplinaires sont légion. Ils croisent les disciplines et les registres de savoirs.

Pour aller plus loin, on pourra consulter :

Bédouret, d., Thémines, J.F., Glaudel, A., Genevois, S., et Grondin, P. (2022). L’imaginaire des élèves en géographie à l’école et au collège. Cybergeo : European Journal of Geography. https://doi.org/10.4000/cybergeo.39252

 

Géodusocle (équipe de recherche collective), « La géographie apprise à l’école et au collège : quelques clés de lecture à partir d’une recherche conduite dans plusieurs académies », Géoconfluences, mai 2022



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