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DE LA RECHERCHE A LA FORMATION

Nous avons créé ce blog dans l'intention de faire connaître les travaux de recherche en didactique de la géographie. Notre objectif est également de participer au renouveau de cette discipline, du point de vue de ses méthodes, de ses contenus et de ses outils. Plus globalement nous espérons que ce site permettra d'alimenter les débats et les réflexions sur l'enseignement de l'histoire-géographie, de l'école à l'université. (voir notre manifeste)

lundi 11 février 2013


LEROUX X, JANSON A., MALCZYK B., HORRENBERG A. (2011) Géographie à vivre. Schiltigheim : Accès éditions.



Les éditions Accès proposent depuis deux ans une série de manuels intitulés Géographie à vivre à destination des classes de cycle 3 (CE2, CM1, CM2). Ces manuels répondent à une double aspiration didactique et scientifique.
Didactique d’une part, parce qu’il s’agit d’accompagner les enseignants de cycle 3 dans la mise en œuvre des programmes sur lesquels ils ont reçu peu de directives, les documents d’accompagnement ayant été publiés en janvier 2012 soit quatre ans après les programmes.
Scientifique ensuite parce qu’il y a une volonté de renouveler la géographie scolaire traditionnellement descriptive et vidalienne pour prendre en compte le tournant spatial des années 1980-1990. « La géographie a bien changé. Elle n’est plus cette des longs inventaires de capitales, sommets, longueurs de fleuves et autres départements. Elle a dépassé le stade des rapports homme-nature pour se consacrer désormais à l’étude de l’organisation des espaces par les sociétés humaines », p. 8.
Le projet est donc ambitieux. La qualité de la réflexion  et de la production doitvent être soulignées. Il semble, au regard de son succès dans les formations continues proposées aux professeurs des écoles, répondre aux attentes du corps d’inspection et du corps professoral. Il est vrai que cette série de manuels propose une lecture cohérente, organisée et structurée du programme de cycle 3 en géographie. Ces manuels s’organisent donc en modules thématiques facilement programmables puisqu’ils correspondent à une période chacun (intervalle de temps entre deux vacances scolaires). La planification thématique s’articule à une progression méthodologique des apprentissages. Le CE2 est orienté vers la description de paysage à l’aide de photographies, la production de croquis de paysage et le repérage dans l’espace par le biais de plan et de cartes. En CM1, les élèves travaillent, à l’aide de documents plus variés (tableau statistique, plan etc.), sur la comparaison et la répartition des phénomènes étudiés. Ils commencent à réaliser des productions graphiques (cartes et schémas). L’année de CM2 est consacrée à l’étude des organisations spatiales.
Bien que pas toujours lisible (trop petits), le corpus de documents proposé est varié et son utilisation a été pensée dans la progression proposée. Cela reflète la volonté de travailler des savoir-faire variés, en s’appuyant des différentes techniques avec des approches multiscalaires.
 Néanmoins cette entreprise soulève deux réserves.
La première est éthique et déontologique. Cette série de manuels proposent des séquences clés en main aux enseignants. Ce sont des manuels hybrides : ce ne sont ni des manuels à destination des élèves, ni des manuels du maître. Un manuel traditionnel propose des activités et du cours mais l’enseignant doit opérer un travail d’appropriation qui est l’expression de sa liberté pédagogique. Les manuels Géographie à vivre prennent en charge l’intégralité du travail de l’enseignant. Certes, cela est rassurant pour des enseignants souvent dépourvus de formation disciplinaire approfondie en géographie. Rien n’empêche chaque enseignant d’adapter les séquences et les séances proposées. Néanmoins, ces adaptations sont marginales, parce que les enseignants sont désarmés. Cela pose la question de la liberté pédagogique de l’enseignant.
La seconde réserve s’inscrit dans le champ didactique. Il y a une véritable volonté d’innovation dans ces manuels. Néanmoins, on peut regretter que la réflexion didactique ne soit pas toujours poussée jusqu’au bout et que dans des approches innovantes, surgissent des éléments de vulgate très classique. Par exemple, le chapitre sur la lecture de paysage en CE2 amène à réfléchir à la diversité des paysages, à leur évolution, à leur échelle, ce qui permet de dépasser l’appréhension souvent simpliste et réaliste de ce qu’est un paysage. De plus, des liens intéressants sont faits avec le cours de français. On ne peut que souscrire à l'interdiciplinarité. A côté de cela le manuel propose une méthodologie d’analyse de la photographie en la découpant par plan, ce qui reste très classique et relativement moins efficace qu’un découpage par unités paysagères par exemple. C’est une pratique fortement ancrée dans la culture scolaire dont la plus-value en terme d’apprentissages est faible, voire nulle en soi. Les auteurs ont simplement reproduit là des pratiques en cours. Ils mobilisent par ailleurs la technique de croquis de paysage.
D’une manière générale, les auteurs semblent avoir une vision construite et réfléchie de la géographie savante qu’ils souhaitent transposer dans ce manuel. Ils parviennent à impulser des réflexions épistémologiques en cycle 3 autour de la carte ou du paysage. Remarquable. Néanmoins,  les modalités et les finalités de transposition ne semblent pas toujours complètement abouties. On ne peut qu'inviter aux auteurs à aller plus loin. Quelle géographie voulons-nous défendre à l'école ? Quelles sont les finalités de cet enseignement ? Quelle praxis est-il nécessaire de mettre en place dans le cadre de cet enseignement ? Ces questions dépassent le cadre même d’un manuel scolaire.

Pour conclure, cette série de manuels est une proposition innovante et originale très utile pour les enseignants. On ne peut qu'appeler les auteurs à continuer dans cette voie.

Ce qu'en disent :
Café pédagogique
Les Clionautes
Enseignants du primaire


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